Islamophobie
En France, depuis 2018, la Commission Nationale Consultative des Droits de l’Homme définit l’islamophobie comme étant une “attitude d’hostilité systématique envers les musulmans, les personnes perçues comme telles ou envers l’islam” [1]. D’autres organismes français ou européens la définissent également et depuis plus longtemps encore. Le Conseil de l’Europe la définit dès 2005 [2], le Collectif Contre l’Islamophobie en France en fournit une définition à partir de 2011 [3], l’Organisation des Nations Unies pour l’Éducation, la Science et la Culture la caractérise à partir de 2012 [4], et à partir de 2013 l’Organisation pour la Sécurité et la Coopération en Europe la décrit également [5]. Il apparaît ainsi clairement que l’islamophobie, comme hostilité à l’encontre des musulmans et de l’islam, a une existence sémantique incontestable depuis de nombreuses années déjà.
Un regard historique sur l’islamophobie européenne permettrait vraisemblablement d’en dater son apparition au moment même de l’apparition de l’Islam et particulièrement au moment des guerres religieuses qui ont suivi cet avènement. À partir de la période coloniale européenne, cette islamophobie religieuse va muter en une islamophobie savante [6]. Investi d’une œuvre civilisatrice, le colonisateur européen se devait de valoriser la civilisation européenne, d’essence chrétienne, et d’amoindrir les civilisations africaines ou proche-orientales, d’essence musulmane. C’est ainsi que l’Islam a été considéré comme une religion « inférieure » pour individus « inférieurs », apportant ainsi la touche finale aux racismes et aux racialismes de l’époque, les deux autres outils développés pour justifier la domination ethnique européenne. Des études « savantes » du coran ont ainsi été mobilisées pour altériser les musulmans : les transformer en cet autre différent, menaçant et récalcitrant à la civilisation européenne ; et pour expliciter l’infériorité supposée de l’indigène : « infériorité intellectuelle », « bestialité », « mœurs débridées », « violence ». Il faut bien comprendre que cette lecture tronquée et décontextualisée du coran servait les intérêts impérialistes de l’époque, ceux de la domination coloniale, et venait compléter d’autres formes de déshumanisations, à l’instar du racisme biologique comme avec le primitivisme du professeur Porot [7]. Bien sûr, les éléments critiques de ces pseudo-sciences étaient à l’époque systématiquement mis de côté.
En dépit de cette existence sémantique et de son existence historique, on assiste à une coexistence assez surréaliste entre les personnes qui estiment que l’islamophobie n’existe pas, que l’islamophobie est une invention des islamistes, ou encore qu’il est parfaitement normal d’être islamophobe. Cette coexistence de postures ne peut se comprendre que si l’islamophobie est perçue comme la critique du fait religieux, de l’Islam donc, et se refuse à prendre en compte les définitions établies de l’islamophobie. Un refus qui prend sa source dans plusieurs négations. 1) Négation des discriminations spécifiquement subies par les musulmans : l’existence des discriminations est pourtant nécessairement consécutive à des conceptions négatives sur les musulmans. 2) Négation du racisme : sous prétexte que les musulmans ne forment pas une race, les conceptions négatives qui les touchent en tant que catégorie sociale ne sauraient exister. 3) Négation du fait que la critique de l’Islam peut masquer un racisme : établir que la violence chez les musulmans s’expliquerait par les passages violents du coran revient à les essentialiser, c’est-à-dire à ôter leur humanité en les réduisant à leur musulmanité, les considérant alors comme incapables de distanciation par rapport aux passages violents des textes religieux. Cette assignation touche spécifiquement les musulmans et épargne les croyants des autres religions monothéistes dont les livres saints sont tout aussi violents. 4) Négation des postures de l’extrême-droite : cette dernière constitue l’Islam comme un problème et souhaite une Europe débarrassée des étrangers et des français musulmans. Elle aussi se base sur la critique du fait religieux et pour poser son diagnostic et comme cheval de Troie pour contaminer société et partis politiques. Preuve que la critique du fait religieux est loin d’être aussi anodine qu’il n’y paraît et qu’elle peut-être mobilisée pour produire une essentialisation des musulmans et des conceptions négatives sur eux.
Analyse religieuse versus analyse politique
La permanence de ce déni peut s’expliquer par plusieurs éléments différents. Premièrement, par un anti-cléricalisme historique issu de la Révolution française et qui pousse à un aveuglement sur la question de l’Islam et sur la violence des préjugés négatifs qui accablent les musulmans. Deuxièmement, on trouve une mutation des racismes traditionnels (politiquement inacceptables [8]) en pseudo-critiques religieuses (politiquement acceptables). Cette mutation vise les mêmes personnes et possède les attributs du racisme : catégorisation, essentialisation, hiérarchisation. Troisièmement, dans un contexte de crise politique, on trouve aussi un détournement de l’opinion publique sur des logiques sécuritaires, la figure du musulman problématique (politiquement consensuelle) est alors mobilisée pour détourner l’attention de l’opinion des mauvaises gestions des crises. Quatrièmement, et donnant corps à la thèse controversée de Huntington sur le choc des civilisations, depuis de nombreuses années se dessine une opposition frontale de l’occident vis-à-vis de l’orient et qui passe par la constitution du musulman comme ennemi à un niveau international, permettant ainsi différentes guerres et ingérences impérialistes (Irak, Syrie, Afghanistan, Palestine etc). Cinquièmement, par le fait que, plusieurs fois endeuillée par des attaques terroristes perpétrées par des musulmans et aux cris de Allahou Akbar, la France est meurtrie et cherche à donner du sens à ces attaques. Le problème étant qu’aucune analyse politique ne parvient à s’imposer dans un champ médiatique saturé d’analyses religieuses constituant l’Islam comme un problème, et établissant que la France est attaquée pour ses valeurs, qu’elles soient républicaines, de laïcité ou de liberté d’expression, autrement dit, pour ce qu’elle est.
Dans ce contexte, l’analyse religieuse s’impose et exclut même violemment toutes tentatives d’analyses politiques, perçues comme des justifications du terrorisme, et donc comme des menaces graves. C’est ainsi que la lutte contre les conceptions négatives sur les musulmans et contre les discriminations qu’ils subissent se trouve violemment attaquée. Il est cependant crucial de mener cette analyse politique. Dans une tribune du Nouvel Observateur, les universitaires Egger et Magni-Berton font l’état de l’art universitaire sur le lien entre politiques d’État et terrorisme. Ils expliquent que la majorité des études mettent en évidence que les pays ciblés par le terrorisme le sont pour ce qu’ils font et non pour ce qu’ils sont [9]. En clair, deux éléments ressortent de ces études et analyses statistiques et permettent d’expliquer pourquoi certains pays sont particulièrement touchés: 1) les politiques étrangères menées, en particulier lorsqu’elles secondent les politiques étrangères des États-Unis ; 2) les politiques domestiques, en particulier lorsqu’elles stigmatisent les musulmans et laissent des situations violentes et discriminatoires perdurer. Cette position vient d’être reprise par une quarantaine de spécialistes sur le sujet et qui soutiennent la thèse du pompier-pyromane : les guerres contre le terrorisme aggravent tous les problèmes [10]. Cette approche phénoménologique se doit d’être complétée par une analyse critique des politiques françaises, afin de permettre une interprétation matérialiste de l’émergence de ces violences.
Critique des politiques étrangères françaises
Il serait difficile de mener une critique exhaustive des politiques étrangères françaises, il ne sera donc fait ici que la critique de quelques grands axes. La France est aujourd’hui impliquée militairement dans plus d’une dizaine de pays d’Afrique et du Proche-Orient [11].
Officiellement invitée par les dirigeants des pays du Sahel et œuvrant pour la stabilité, la paix et la lutte contre le terrorisme, la présence militaire française est surtout là-bas pour défendre les intérêts économiques et stratégiques de la France. Il s’agit de préserver l’accès à des ressources de haute importance, de faciliter le maintien et l’implantation des grands groupes économiques français, et cyniquement, de permettre la valorisation à l’exportation du matériel militaire « made in France » : testé et approuvé sur le terrain. La présence française dans ce qui furent des anciennes colonies apparaît comme un néocolonialisme qui, en maintenant un certain ordre et une mainmise sur les ressources, maintient tant les inégalités économiques, que les pouvoirs corrompus et les violations des droits humains par ces mêmes pouvoirs [12]. Se faisant, elle empêche les oppositions et les évolutions sociétales et en tant que force étrangère elle produit une fracturation des sociétés en induisant une polarisation entre résistants et collabos : un terreau sur lequel croît très facilement la haine, la violence et en dernière instance les radicalisations.
Au Proche-Orient, la politique française est désormais alignée sur la politique des États-Unis, un alignement problématique si on considère la virulence de l’impérialisme états-unien et les incessantes ingérences de ces derniers dans la région. À ce sujet, il est central de rappeler que la seconde guerre d’Irak a été justifiée par le mensonge au sujet des armes de destruction massive [13]. Un mensonge qui fit entre cent mille et un million de victimes civiles et dont les auteurs n’ont jamais été punis. Ce mensonge a aussi déstabilisé toute cette région, ouvrant un boulevard à l’établissement de l’État islamique qui a lui-même signé le début d’une nouvelle guerre. Difficile de mieux démontrer l’effet contre-productif et absurde de cette guerre et plus généralement des guerres contre le terrorisme [14]. Notons qu’à cette époque la France s’était opposée à cette intervention militaire, preuve étant qu’elle était alors capable d’audace et d’indépendance. Aujourd’hui impliquée dans la guerre contre daesh, la France est militairement présente en Irak et en Syrie.
Concernant les volets économiques et diplomatiques dans cette région du monde, on peut évoquer des interactions problématiques avec au moins trois États. L’Arabie Saoudite est ainsi régulièrement sur le podium des plus gros importateurs d’armes françaises. On parle d’une dictature monarchique, tristement célèbre pour ses assassinats de journalistes, qui bafoue à peu près tous les droits humains [15], et qui est à la tête d’une coalition accusée de crimes de guerre au Yémen [16]. Bien qu’aujourd’hui la France semble en dehors du jeu militaire Égyptien, il apparaît qu’elle a étroitement contribué à la stabilisation de la dictature naissante du général Al-Sissi sur la période 2007-2016. En livrant armes et systèmes de surveillance, elle a contribué à briser toute opposition et a participé ainsi à la répression sanglante des opposants [17]. La collaboration avec Israël est également à relever, ce alors que ce pays colonise depuis toujours, bafoue le droit international depuis des décennies, et est formellement accusé d’apartheid depuis 2017 [18]. Une position qui s’accompagne à la fois d’une certaine fascination pour le modèle répressif israélien [19], et par la recherche constante de la condamnation des mouvements de solidarités avec la Palestine, BDS notamment [20].
Ces collaborations militaires et/ou diplomatiques avec des régimes d’apartheid ou dictatoriaux sont non-seulement contraires aux valeurs que la France se complaît à revendiquer, mais surtout elles mettent directement en danger des populations et des oppositions. Comme au Sahel, elle bloque les évolutions sociétales, et comme au Sahel elle produit du ressentiment à l’encontre des français et constitue ainsi un terrain propice au développement d’une radicalisation islamiste violente. Sur le territoire français, toutes ces politiques produisent une perte de confiance dans les valeurs françaises qui peuvent avoir un effet dramatique sur des jeunes en manque de repères.
Critique des politiques intérieures françaises
Sur la scène politique intérieure, il faut mettre le doigt sur tous les non-dits d’une République qui n’a pas tenu ses promesses.
Tout d’abord, il faut dénoncer la ghettoïsation des populations d’origines étrangères, africaines et maghrébines en particulier, car elle alimente les fantasmes de communautarisme et de séparatisme. Les concentrations ethniques et religieuses qui résultent de ce phénomène ne sont pas choisies par les populations qui y vivent, elles sont subies et résultent de la précarité économique qui touche les personnes concernées et qui les relèguent dans les quartiers populaires. On parle d’un prolétariat ethnique, voire d’un sous-prolétariat ethnique, surexposé aux politiques de casse sociale, aux discriminations et au chômage [21], ainsi qu’aux violences en tout genre qui émergent spontanément dans les conditions socio-économiques propres au sous-prolétariat [22]. Ce positionnement économique est particulièrement injuste puisqu’il est le produit des systèmes de discriminations raciales établis par les européens au moment de la période coloniale. Cette filiation historique a son importance, car elle conditionne encore aujourd’hui une gestion coloniale des banlieues françaises. Une gestion qui rejette par principe les origines sociales et raciales de la violence urbaine, et qui est implicitement basée sur le principe d’une population considérée comme « incompatible avec la civilisation » et ne pouvant donc être « domptée » que par la force, ce qui la surexpose depuis longtemps aux violences policières [23, 24]. Notons au passage la persistance dans le temps de désignations problématiques telles que « descendant de deuxième ou troisième génération » qui suggèrent un perpétuel défaut d’appartenance à la France chez les jeunes issus de l’immigration maghrébine ou africaine.
Ensuite, il est essentiel d’évoquer les discriminations et violences subies de façon spécifique par les musulmans français. Traduction du peu d’intérêt politique pour ce sujet, les données sont peu nombreuses. Le Collectif Contre l’Islamophobie en France, organisme qui s’était créé dans le but de lutter contre ces discriminations en s’appuyant sur le droit français et qui avait entrepris un travail de recensement des actes islamophobes, est désormais honni et dissous. C’est à la fois un délit d’opinion, un abus de pouvoir, un acte en dehors de l’État de droit, et une faute politique d’une extrême gravité. Notons son dernier rapport de 2019 sur le sujet qui indiquait une hausse de 50 % des actes islamophobes recensés entre 2017 et 2018, portant leur nombre à plus de 600 [25]. Ce chiffre, qui peut paraître faible, est en réalité très sous-estimé, les victimes étant dans une situation de défiance des institutions perçues comme non-protectrices, inutiles voire hostiles, ne se signalent pas dans l’écrasante majorité des cas. Parmi les violences commises à l’encontre des musulmans il faut relever des mosquées brûlées, des agressions verbales et physiques visant les musulmans et en particulier les musulmanes. Quelques études apportent un éclairage sur les discriminations subies par ces derniers. Une enquête menée en 2015 montrait que 40 % des musulmans d’Île-de-France interrogés rapportent avoir vécu une discrimination religieuse au cours des 5 dernières années [26]. Des méthodes par testing sur la base de CV ont montré la dévalorisation systématique du candidat musulman : entre 2,5 et 4 fois moins de chance d’obtenir un entretien d’embauche qu’un candidat non-musulman [27, 28]. Conséquences de ces discriminations à l’embauche, ces mêmes enquêtes mettent aussi en évidence un revenu mensuel inférieur de 400€ en moyenne chez les ménages musulmans en comparaison avec les ménages chrétiens [27].
Enfin, ces discriminations et violences subies spécifiquement par les musulmans succèdent nécessairement à des conceptions négatives plus ou moins diffuses dans la société, ce qu’il convient donc d’appeler une islamophobie. Cette dernière se trouve illustrée par la permanence des polémiques politico-médiatiques sur l’habillement des musulmans, mais aussi sur leur alimentation. Rappelons que la laïcité n’est censée garantir que la neutralité religieuse de l’État, pas celle des espaces publics ni celle des usagers des services publics. Une lecture non-instrumentale de cette dernière devrait donc s’opposer à de telles polémiques et garantir aux musulmans les droits fondamentaux qui sont les leurs dans l’espace public, sans qu’ils n’aient à souffrir de discours stigmatisants et dégradants. La défense obstinée des caricatures du prophète en est un second exemple. Le prophète est la figure type du musulman, en plus d’un guide religieux et spirituel intemporel. Sa représentation sous forme de personnage aux airs tantôt abrutis, tantôt colériques, dans des postures bestiales, ou affublée d’ornements menaçants est un avilissement qui fait référence aux clichés raciaux et islamophobes de la période coloniale [29]. Nier les processus d’identification des musulmans à leur prophète et faire de ces conceptions négatives des musulmans une ligne de front de la liberté d’expression, de la critique religieuse, du blasphème, voire un instrument pédagogique est nécessairement problématique. Notons également, pour terminer, les grandes différences de traitement politico-médiatique des actes terroristes suivant qu’ils sont le fait de musulmans ou de non-musulmans. Le double meurtre de Cholet du 14 novembre dernier et perpétré par un chrétien “guidé par Dieu”, a ainsi eu un écho médiatique mineur. Les explications sociologiques ont été avancées pour expliquer ce passage à l’acte et l’état mental instable de son auteur a été rapidement suggéré [30]. Au contraire du non-musulman, le musulman ne saurait souffrir de troubles psychologiques, est nécessairement animé d’un projet politique d’islamisation de la société et cristallise une attention médiatique extraordinaire. Les conceptions négatives sur les musulmans battent alors leur plein et occultent l’influence d’un environnement social délétère et les profils particuliers des terroristes: délinquance, déculturation, velléités suicidaires, addictions [31].
La politique économique libérale qui est menée depuis des décennies, en produisant casse sociale et précarisation, l’aveuglement des pouvoirs successifs sur les racismes, les discriminations et les violences policières, le mépris pour les classes populaires et l’indifférence crasse à la relégation des minorités ethniques et religieuses dans les cités ont alimenté de grandes défiances vis-à-vis et du pouvoir politique. En désignant les victimes de ces politiques médiocres comme des séparatistes et des ennemis de la République, le pouvoir ajoute l’injure à des décennies d’incompétence et ne fait qu’alimenter ressentiment et division, sans apporter une quelconque réponse politique à la hauteur des enjeux. Ce faisant, et comme avec ses politiques étrangères, le pouvoir produit un terreau propice aux radicalisations qui lui aussi favorise le développement d’un islamisme violent.
Conclusion
Dans cet article nous avons rappelé l’existence de l’islamophobie, à la fois sémantique, historique, et son expression moderne. Une expression faite de discriminations et de violences contre les musulmans, mais aussi faite de conceptions négatives maintenues ou développées à partir d’une lecture essentialisante des textes religieux et qui trouve son origine dans l’islamophobie « savante » de l’époque coloniale. S’appuyant sur une lecture biaisée du coran, ces conceptions négatives et les discriminations et violences qui en découlent méritent amplement la qualification d’islamophobes, terme qui doit donc être utilisé pour rendre compte de ce phénomène.
Le terme islamophobie est très critiqué en France parce qu’il sous-entendrait l’impossibilité d’une critique religieuse rendue impérieuse par les violences terroristes contemporaines. Cependant, deux grilles d’analyse tentent de rendre compte de ces violences, la grille d’analyse religieuse et la grille d’analyse politique. Somme toute, la grille d’analyse religieuse considère que l’islamisme est le problème, elle repousse toute analyse politique. Une telle analyse constitue l’autre comme un ennemi et n’engendrera que des lois liberticides, répressives et de surveillance des masses. Elle produira aussi vraisemblablement de nouvelles guerres et ne mettra en aucune façon fin aux violences. Au contraire, la grille d’analyse politique, validée par les savoirs universitaires, prend en compte les conséquences des errances politiques françaises, qu’elles soient internes ou externes. Elle permet de rendre compte de l’émergence des phénomènes violents qui traversent notre société et le monde entier, et permettrait ainsi d’y apporter des réponses politiques pertinentes: luttes anti-impérialistes, luttes contre les guerres occidentales, luttes contre les racismes et discriminations, islamophobie inclue, luttes contre les politiques de casse sociale, luttes contre les violences policières. Il est urgent de substituer la première grille par la seconde afin de sortir du cercle vicieux violent qui empoisonne les relations ethniques et religieuses sur notre territoire et entre l’orient et l’occident à un niveau international.
Plus spécifiquement, et considérant que l’Islam est la religion d’une partie importante du prolétariat, les attaques islamophobes doivent être considérées comme étant de même nature que les attaques racistes: 1) un mépris de classe de la bourgeoisie pour la classe ouvrière; 2) une stratégie délibérée de la bourgeoisie visant à diviser le prolétariat sur des phénomènes sociétaux qui ne les opposent pas dans leurs conditions matérielles; 3) une hypocrisie patente de la bourgeoisie qui se caractérise par la collaboration avec des régimes islamistes dès lors qu’ils servent leurs intérêts. De ce point de vue, l’appel au prolétariat à ne pas céder aux divisions islamophobes est déterminant pour les luttes à venir. Et alors qu’ils sont attaqués, les prolétaires musulmans doivent pouvoir compter sur notre solidarité de classe, entière et inconditionnelle. Ainsi, les Jeunes Communistes de la Loire appellent à se mobiliser et contre les politiques impérialistes françaises et contre la précarisation des individus, contre les racismes, islamophobie inclue, et contre les violences policières, c’est-à-dire à la fois contre le capitalisme et ses outils de division et de répression habituels.
Sources:
[3] L’association étant désormais dissoute, il n’y a plus de liens vers cette ressource
[6] Olivier Le Cour Grandmaison, « « Ennemis mortels » – Représentations de l’Islam et politiques musulmanes en France à l’époque coloniale » »
[8] Ces dernières années on observe cependant un retour de propos racistes, notamment en raison de la promotion par l’extrême-droite d’une parole médiatique outrancière et qui s’inscrit dans une logique de dédiabolisation du Rassemblement National (plus d’infos ici).
[26] Patrick Simon et Liza Rives, « Religion et discrimination », Homme & Migrations, vol. 1, n° 1324, p. 8-9 (2019)
[27] Claire Adida, David Laitin et Marie-Anne Valfort, « Les Français musulmans sont-ils discriminés dans leur propre pays ? Une étude expérimentale sur le marché du travail », Presses de Sciences Po, Paris, (2010)
[28] Marie-Anne Valfort, « Discriminations religieuses à l’embauche : une réalité », Institut Montaigne, Paris (2005)